Nativité

Une nuit froide de Janvier 1981, j’ai accouché mon épouse dans le couloir d’un hôpital de province à Orthez. C’était un garçon dans un triste état, deux tours de cordon ombilical autour du cou, sa couleur était proche du « vert bouteille ». J’ai déroulé le cordon, il cherchait sa respiration et un peu paniqué je suis allé demander de l’aide au gynécologue qui était déjà en train d’accoucher une jeune Portugaise, dont les hurlements traversaient les murs du bâtiment.

Aidé de son infirmière, il a pratiqué les soins nécessaires, transféré mon épouse dans une

chambre et disparu avec mon fils dans une salle de soins.

Après quelques minutes, j’ai été invité à entrer. le bébé était couché dans une couveuse, faisant toujours de gros efforts pour trouver sa respiration.

Il était 3 heures 15 du matin.

« Il pèse 960 grammes », me dit le médecin. « Je ne peux garantir qu’il sera normal ni qu’il survivra. Je vous laisse dix minutes pour prendre votre décision : soit on le transfère, soit on le laisse faire la nature » et il a quitté la pièce.

Je suis resté seul avec mon fils que je voyais lutter pour survivre, sa couleur verdâtre avait  disparu, faisant place petit à petit à un joli rose clair. Extérieurement, il semblait normalement formé. Rapidement, je fis part de ma décision au médecin qui de suite décrocha son téléphone. Trente minutes plus tard, je vis arriver une ambulance dans la cour de l’hôpital.

Un médecin et son infirmière en sont descendus, équipés d’une couveuse à l’allure d’un engin spatial et se sont penchés sur mon fils, débutant une chorégraphie incroyable que je n’ai jamais oubliée : pose sur ce petit corps de même pas un kilo de plusieurs perfusions microscopiques, d’oxygène, de défibrillateur, le tout en quelques minutes. J’ai obtenu au moment ou ils partaient, un détour par la chambre de mon épouse qui a eu la joie de voir son fils quelques instants. Puis ils sont repartis aussi vite qu’ils étaient arrivés vers l’hôpital de Pau.

Mon fils, Jean-Sébastien, restera trois mois dans ce service exceptionnel des grands prématurés crée par le Docteur Saint Martin. Trois mois d’inquiétudes, de questions, de joies mais très entourés par le personnel soignant.

Le Docteur Saint Martin, probablement pour nous rassurer, nous a raconté que deux grands personnages de notre histoire avaient commencé leur vie en tant que grands prématurés, à l’époque ou la médecine n’était pas très performante, dans l’inconfort d’une boite à chaussures, enveloppés dans du coton. C’étaient Winston Churchill et le Général de Gaule. Je n’ai jamais pris la peine de vérifier cette information, de peur d’être déçus si cela n’était pas vrai. Mon épouse Marie et moi avons vécu plusieurs mois accrochés à cette image rassurante.

Aujourd’hui, personne ne peut se vanter d’être né dans cette ville du Béarn. Il y a quinze ans que l’hôpital à fermé sa maternité.

Comme en studio

De Paris au Périgord (1969-1999)

Du Béarn au littoral (1965-1999)

 

 

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